Nouvelles perspectives sur le mécanisme de la fission nucléaire

Résultat scientifique Physique

La collaboration internationale nu-Ball, travaillant sur l'installation ALTO du laboratoire IJCLab, apporte de nouveaux résultats éclairant la manière dont les fragments de fission d’un noyau atomique acquièrent spontanément un mouvement de rotation sur eux même : le moment angulaire. Cette étude à laquelle sont associés 6 laboratoires de l’ IN2P3, dont Subatech (CNRS/IMT Atlantique - Institut Mines-Telecom/Université de Nantes), fait l’objet d’une publication ce jour dans la revue Nature.

La fission nucléaire, dans laquelle un noyau lourd se scinde en deux et libère de l'énergie, est connue depuis plus de 80 ans. Cependant, aujourd’hui encore, des questions restent ouvertes sur le phénomène. Les scientifiques se demandent notamment comment expliquer que lorsqu'un noyau atomique lourd fissionne, les fragments qui en résultent possèdent un moment angulaire (ils tournent sur eux-mêmes), tandis que le noyau original n’en a pas du tout. Ce phénomène, extrêmement complexe à observer, est au cœur d’une nouvelle étude menée par la collaboration internationale nu-Ball dirigée par le Laboratoire Irène-Joliot-Curie (IJCLab) à Orsay. Ses résultats paraissent aujourd’hui dans l'article « Angular momentum generation in nuclear fission » publié dans la revue Nature.

Pour s’attaquer à cette question, la collaboration nu-Ball a cherché à préciser le moment précis où le moment angulaire apparaissait dans les fragments. S’il était créé pendant la déformation du noyau fissionnant ou juste après la rupture. Dans le premier cas, un couplage entre les spins des deux fragments devait être constaté. L’absence de couplage plaiderait en revanche pour une mise en rotation décalée. Pour mesurer cela la collaboration nu-Ball a induit des réactions de fission nucléaire avec la source de neutrons pulsés Licorne et a mesuré les rayons gamma émis lors de l’expérience avec l’ensemble de détection gamma nu-Ball. Les échantillons irradiés étaient de l'isotope d'uranium 238U et de l'isotope de thorium 232Th. Les expériences ont été réalisées de février à juin 2018 avec plus de 1200 heures de faisceau cumulé auprès de l’accélérateur du tandem.

Les nouvelles données semblent indiquer que le moment angulaire observé dans les fragments de fission est en fait généré après la division du noyau. Comme attendu, les détecteurs gamma observent que le moment angulaire moyen des fragments varie avec leur masse, en suivant une courbe en dent de scie. Mais il ressort aussi que les deux fragments ont des masses distinctes et un spin moyen différent.